Même si ça m'arrive chaque année en novembre, j'ai toujours la tendence à confondre les symptômes physiques avec ceux de quelque mal mental. Et je pense sérieusement qu'il s'agit bien d'une dépression clinique jusqu'au moment oü une fièvre légère me retourne à la réalité. Il n'y a pas de maladie mentale qui donne de la fièvre...
Je suis en train de lire Manuel d'exil. Comment réussir son exil en trente-cinq lessons, de Velibor Čolić. Tout d'abord, je l'ai vu dans une livrerie et j'ai pensé que c'est juste un livre qu'il me faut absolument, mais ensuite j'ai décidé de l'emprunter à la bibliothèque. Pas pour faire l'économie de ces huit euros cinquante, mais pour ne pas traîner le poids de ce livre tout le chemin d'ici à Amsterdam; en fait, ça s'est révélé très correct comme intuition. Enfin, exile, je n'ai peut-être pas le droit d'utiliser ce mot. Pas comme Čolić, en tout cas. Pas "trop d'accent, trop de guerre pour me voir en vrai Européen". Ai-je de l'accent? Je ne me suis jamais vue comme ça. Par contre... oui... comme si une espèce d'hypercompétence. Je connais la plupart des langues de l'Europe. Quelquefois ça me fait même plaisir de lire quelques paragraphes d'Andersen en danois... J'ai commencé à lire et à écrire en français, parce que je me suis sentie mal en vivant dans une boule néerlandaise en tant que je suis ici. Et peut-être c'est vraiment ma dernière chance de parler français sans accent, même en doutant si je reviens à l'écrire comme avant, quand nous nous faisions des illusions à Cracovie... Civilisation, ma mère! -- et ce n'était pas le titre du roman de Driss Chraïbi, pour la plupart du temps... Mon néerlandais passe de B2 à C1, tranquillement. Cette longue soirée de novembre, je l'ai passée en apprenant des noms des animaux sur Vikipédia; ceux des Pays-Bas, et ceux d'Indonésie, comme het schubdier en de waterbuffel, et même het spookdiertje... Et après, il ne me restait que la botanique: mossen, korstmossen, wolfsklauw, paardenstaart... Je n'ai quand même pas d'idée trop précise comment ça serait en français... Probablement parce que je n'ai jamais imaginé France comme patrie. Je me refais une enfance néerlandaise. There was frost in the morning, some days ago. A colleague looked to me with compassion, en me demandant minus combien de degrées faisait en Pologne à ce moment-là. I didn't know what to answer, I never know, this is the reason why they think I don't speak French, and they switch to their clumsy English. Et si l'on peut vraiment avoir trop d'accent pour se voir en vrai Européen... Bon, en tout cas c'est pas moi. Autant d'enfances refaites en langues d'Europe... Revamped childhoods: Andersen's fairy tales in Danish, German lullabies played on music boxes hidden in the stuffed toys from Rossmann, onderdelen of the kingdom of plants in Dutch... Even the ghost stories I bought in Prague -- and avidly read on my way -- in bilingual, English-Czech edition... The yellow giraffe I bought in Hema last weekend, making me think about that Georgian naif painter, Pirosmani. This is but my native shore of departure for even greater travels... It is a privilege to sit in the circle of light under this civilised French lamp in genuine alabaster. I also read Zeidan's Azazel, finally. In the French translation, it tastes so Flaubertian, telle une nouvelle Tentation de Saint Antoine... I promise myself one day I will read it in its original Arabic. Perhaps I should mention this: yesterday I started to write a new book, destined to make some order in my former articles published in Polish and all those serendipitous readings in world literature. Its title, unsurprisingly, is The Book of the World.
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September 2022
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